Le 19 novembre 2021.
Parfois, je me réveille la nuit et je ne peux plus dormir. Mon esprit tombe dans cette humeur où les distances semblent palpables, où je réalise à quel point mon cœur se tend vers vous, de l’autre côté de l’Atlantique. Vous avez accepté que je parte aux Etats-Unis sans une seule complainte.
Parfois, je me réveille la nuit et quand je ne peux plus dormir, je pense au temps qui passe, et au temps que je ne passe pas avec vous.
Je ne sais pas comment résoudre ce problème. Je ne sais plus.
Avant, c’était simple. Il me suffisait de faire mes valises, et de déménager. De quitter mon travail pour un autre en Suisse. Mais maintenant ? Maintenant, j’ai une compagne qui vient d’un autre bout du monde, j’ai une maison qui, j’espère, pourra tous vous accueillir pour de longs séjours. Autant d’attaches qui me forcent à réaliser que je ne vais pas revenir en Europe de si tôt.
Je serai toujours suisse dans mon âme et dans mon cœur. La Suisse est un magnifique pays – un pays stable, démocratique et responsable, dont j’aime la culture du compromis. Un pays avec un système de santé qui tient la route et moins de précarité, moins de crimes, et plus d’égalité des chances.
Ici, je me console avec la mer, avec l’immensité des espaces.
Je me suis promis d’essayer de passer plus de temps de votre côté de l’Atlantique. Je ne sais pas quand ni comment, mais j’en ai besoin. Venir vous voir plus fréquemment. Au détriment de la planète? Peut-être un peu. Quelque part, je suis un citoyen du monde, un monde fait des gens qu’il aime. Mais les distances, et la pollution que les franchir créé, ne font pas de moi un citoyen model.
Je pense à vous. Vous me manquez, et j’ai mal, parfois, lorsque je réalise que le temps passe pour vous aussi de l’autre côté du monde, sans votre fils. Il est trop facile de penser que, parce que on est loin, rien ne change là-bas, dans le lointain. Je ne pourrais jamais vous remercier assez pour toute l’enfance que vous nous avez donnée, à Julie et à moi, à toutes les opportunités que nous avons eues d’explorer le monde avec innocence et des parents qui s’aiment et qui ont tout fait pour nous. Vous nous avez soutenu dans les bons et les mauvais moments, vous nous avez poussé dans nos études et dans ce que nous aimons, pour un bon avenir.
Lorsque je pense à vous, je ne peux m’enpêcher de penser à la méditerranée, à notre monde, à nous quatre, sur un bateau, où rien d’autre n’avait d’importance. Après vous avoir quitté cet été, j’ai écrit cela:
There will always be a part of me attached to the Mediterranean sea. I spent too many days under the bright Greek, French, Croatian or Turkish sun as a kid.
Every other year, the waters of this cradle of civilizations has seen my family go out into its old bays. That sea has seen my sister and me grow. It has seen my parents age, and it will see them get old. Renting a sailboat and dropping the anchor near the shore of its islands was something that defined our family “quality time” the best, at least in my view.
The first trip I did there, Julie wasn’t born. My dad remembers it well as I got sick and vomited all over his shirt as he was holding me. I wasn’t more than two years old. Then, I remember a time when my sister and I were so small my parents had to attach us to the boat to avoid us slipping overboard. Later, I recall my sister jumping in the water as she couldn’t handle the wait as my parents were anchoring, and me saying: “Maman, maman, Julie a sauté!”. I remember one specific taverna near Göçek in Turkey that I will always be able to find on a map, where we went twice, four years apart, because the food was so good, the people so nice, and the waters so crystal. I recall the waves of gigantic ships in the Lefkas canal, making us giggle at the bow. I remember the countless dolphins playing with our hull. I remember us having engine issue in Croatia and having to switch batteries, but also going into an inner lake after passing a canal and anchoring in front of a vibrant waterfall. The laugh of my dad as my mom annoyed him a little as he caught one more plastic bag, but still no fish for dinner. The crazy card games my sister and I would do at night, constructing monstruous ephemeral castles on a moving ship, astonished of how high we could go. I remember Santorini and its white buildings. Its cliffs that were still haunted by the end of the Minoan civilization it had destroyed. Cleopatra’s and Marc Anthony’s beach as they were chased by the Roman Empire. I remember the moments we had to improvise, too. That night my dad and I stayed up because the wind was shifting from north to south, and when we discussed everything and nothing. That time when we had a bad anchor that wouldn’t stop drifting, and we had to fork it with a second one times and times over, but somehow working together and strengthening our bond. The crazy winds we got in the Cyclades islands, where the sand would fly off the nearby beach on our boat. When our toilets were so clogged the valve exploded to my dad’s face and painted the walls. When my mom jumped overboard to clear up the speed indicator, and the big fin we saw surface right after. The countless sunsets. Exploring the nearby cliffs swimming. Going over the ruins of the Mesopotamian civilization near the seven capes of Turkey’s southwestern coast.
We all have our anchors. Mines are in the Mediterranean sea and on the summits of the Alps.
13 September 2021.
Je vous aime. J’espère que vous viendrez ici, dans notre maison, parfois pour plusieurs semaines, et que nous retournerons naviguer, cette fois peut-être dans le Pacifique.
Comments by Mathieu Maender